Issue
Matériaux & Techniques
Volume 110, Number 4, 2022
Special Issue on ‘Glass in our daily life’, edited by Xavier Capilla, Frédéric Angeli and Daniel R. Neuville
Article Number 404
Number of page(s) 14
Section Matériaux désordonnés : verres, vitrocéramiques… / Disordered matérials: Glasses, clays, vitroceramics…
DOI https://doi.org/10.1051/mattech/2022037
Published online 05 October 2022

© D.R. Neuville et L. Cormier, 2022

Licence Creative CommonsThis is an Open Access article distributed under the terms of the Creative Commons Attribution License (https://creativecommons.org/licenses/by/4.0), which permits unrestricted use, distribution, and reproduction in any medium, provided the original work is properly cited.

1 Introduction

Le verre est un matériau homogène qui peut se former à partir de tous les éléments du tableau périodique et tous les types de liaisons chimiques. Ce matériau se distingue des autres états de la matière (solide cristallin, liquide, gaz et plasma) premièrement par son état solide caractérisé par une absence d’ordre à grande distance [1] et, secondement, par la présence d’une transition de second ordre, appelée transition vitreuse [2]. Le lecteur trouvera une publication exhaustive et récente sur toutes les familles de verres et leurs propriétés dans le Handbook of Glass paru récemment [3]. Dans cet article, nous allons simplement présenter quelques concepts généraux, acceptés par l’ensemble de la communauté scientifique et enseignés dans les universités et écoles d’ingénieur.

Un verre est un solide amorphe. Le terme solide implique une viscosité élevée, généralement supérieure à 1011 Pa.s. Cette viscosité limite l’écoulement du corps. Le terme amorphe implique l’absence d’ordre à longue distance ce qui révèle une analogie avec l’état liquide. Un verre est donc un solide dont certaines propriétés sont proches de celles des liquides. Parks et Huffman parlent même « d’un quatrième état de la matière » [4].

L’état de verre peut survenir pour de nombreuses compositions chimiques dès lors que le phénomène de cristallisation est évité. Il existe des verres minéraux et d’autres verres usuels, verres d’oxydes, de sels, de solutions aqueuses, métalliques, verres organiques tels que les gels, les caramels, les bonbons… En fait, il est possible d’obtenir des verres quel que soit le type de liaison chimique : covalente, ionique, métallique, Van der Waals ou hydrogène. L’état de verre correspond donc à une caractéristique de la matière condensée et il peut exister une palette infinie de composition chimique de verres, ayant chacun une structure propre. Comme nous le verrons, chacun d’entre eux, individuellement, peut-être défini comme un matériau ou une substance à part entière avec ses propres caractéristiques physiques et chimiques telle que la température de transition vitreuse, Tg, un diagramme de diffraction de rayons X ou un spectre Raman, une analyse chimique élémentaire, une densité, un indice de réfraction…

De nombreux modes de préparation permettent d’obtenir un matériau amorphe. Ce dernier est généralement élaboré par refroidissement rapide d’une phase liquide, mais il est également possible de les obtenir à partir d’une phase gazeuse, par amorphisation d’une phase cristalline ou encore par des méthodes sol-gel [5]. La méthode la plus classique de formation d’un verre est le figeage d’un liquide lors d’un refroidissement rapide (appelé trempe). On observe au cours du refroidissement d’un liquide une augmentation continue de la viscosité jusqu’à une valeur telle que le matériau puise être considéré comme un solide. On peut donc imaginer la structure du verre comme étant semblable à celle d’un liquide dont tous les mouvements atomiques seraient bloqués. Les verres possèdent, comme les liquides, une structure désordonnée dotée uniquement d’un ordre à courte et moyenne distance. Par exemple, la silice, phase vitreuse, est constituée de tétraèdres SiO4, associés entre eux par un atome d’oxygène mais sans périodicité à longue distance du réseau, contrairement au cristal. L’atome d’oxygène connectant deux atomes de silicium est dit pontant. La figure 1 montre une représentation schématique 2D des tétraèdres SiO4 pour le cas d’un cristal et pour celui d’un verre.

thumbnail Fig. 1

Représentation 2D de : a) une structure cristalline constituée d’atome de Si (cercle noir) et d’oxygène (cercle blanc), on constate un motif géométrique (hexagone) et une périodicité alors que dans la figure b) des arrangements atomiques sont présents (anneaux à 3, 4, 5, 6 tétraèdres) mais ces arrangements ne sont pas réguliers ni périodiques (d’après Zachariasen [6]). Notons que les deux structures ont le même nombre d’atome de Si, mais n’occupent pas la même surface en raison d’une densité plus faible pour le verre que pour le cristal.

2D representation of: a) a crystal structure consisting of Si atom (black circle) and oxygen (white circle), there is a geometric pattern (hexagon) and a periodicity while in figure b) atomic arrangements are present (rings with 3, 4, 5, 6 tetrahedra) but these arrangements are not regular or periodic (according to Zachariasen [6]). Note that both structures have the same number of Si atoms, but do not occupy the same surface area due to a lower density for glass than for crystal.

2 Sonder la structure désordonnée d’un verre ?

Dans la partie 1, nous avons mentionné un verre composé uniquement d’atomes de silicium et d’oxygène, mais comment différencier la structure de la silice de celle d’un cristal de quartz ? La figure 2, montre clairement pour SiO2, amorphe ou cristallin (quartz ou low-cristobalite), les différences spectrales obtenues par quatre sondes structurales différentes : diffraction des rayons X, absorption des rayons X au seuil K de Si, spectrométrie Raman et résonance magnétique nucléaire (RMN) de 29Si.

Quelle que soit la technique expérimentale utilisée, les données des phases cristallines montrent des pics fins alors que celles du verre présentent des pics larges. De façon plus précise, la diffraction des rayons X montre des pics de Bragg très intenses jusqu’à 8 Å−1 pour le cristal de quartz et des bandes larges de très faible intensité pour le verre. L’ordre à courte distance pour des distances inférieures à 3 Å caractérise le polyèdre de coordination SiO4, les distances interatomiques et les angles de liaisons, ainsi que la possibilité d’avoir des liaisons hétéropolaires (Si–O). Ce polyèdre se matérialise également par un pic principal (ou résonance principale) à 1848 eV observé sur le spectre d’absorption des rayons X au seuil K de Si.

Pour résumer, à courte distance, il existe un ordre local qui concerne la première couche de coordination. Celle-ci est régie par la liaison chimique qui impose le nombre de voisins (coordinance), les distances interatomiques, la symétrie du site, par exemple un tétraèdre SiO4 dans les silicates.

La région à plus longue distance entre 3–20 Å correspond aux enchaînements et arrangements entre polyèdres. C’est à cette échelle que se fait la distinction entre phase cristalline et phase amorphe. Une analyse fine de cette zone apporte des informations importantes sur la connaissance des angles entre polyèdres, le type de connectivité (partage de sommets, arêtes, faces), la dimensionnalité 2D ou 3D du réseau et, potentiellement, l’existence d’hétérogénéités structurales/compositionnelles. Aussi bien pour la diffraction que pour l’absorption des rayons X, la perte de signal à longue distance ou haute énergie matérialise la différence entre un état structural ordonné et désordonné [1]. La spectrométrie Raman met également en évidence les différences entre le spectre du quartz et celui du verre de silice. Plus précisément, le spectre Raman de la silice révèle des structures spécifiques au verre, qui n’existent pas dans les phases cristallines : ce sont des anneaux à trois ou quatre tétraèdres SiO4 caractérisés par les pics à 490 et 605 cm−1, appelés D1 et D2, respectivement. En complément, on notera que l’efficacité spectrale Raman d’un cristal de quartz et de la silice amorphe est fortement différente. En effet, le spectre Raman du quartz est acquis en 10 s contre 100 s pour celui du verre de silice.

Pour résumer, à moyenne distance, l’ordre est défini par les relations entre les différents sites, par exemple l’angle entre deux tétraèdres SiO4 dans les silicates. Cet ordre dans les verres est difficile à caractériser expérimentalement et fait l’objet de nombreuses études expérimentales et par simulations numériques. Sa caractérisation est essentielle car cette échelle d’organisation est liée directement à l’origine de la plupart des propriétés des verres, comme la densité, la conduction ionique ou la durabilité chimique.

Enfin, à grande distance, on n’observe pas de périodicité des structures, contrairement aux cristaux, ou de déterminisme dans l’agencement structural, contrairement aux quasi-cristaux [7]. Les amorphes montrent donc une absence totale d’ordre à grande distance.

Ce court paragraphe montre que, quelle que soit la technique structurale utilisée, il est particulièrement difficile d’appréhender la nature et l’étendue de l’ordre à moyenne distance caractéristique du désordre structural du verre. De plus, ce déficit d’informations constitue un des défis majeurs actuels dans la connaissance structurale des verres.

thumbnail Fig. 2

(a) Diffraction des rayons X, (b) Absorption des rayons X au seuil K de Si, (c) Spectrométrie Raman et (d) Résonance magnétique nucléaire (RMN) du 29Si respectivement pour du cristal en rouge (quartz ou low-cristobalite) et SiO2 amorphe en bleu. Pour des raisons pratiques, les spectres sont reportés en unité arbitraire. Les conditions d’acquisition des spectres des phases cristallines et amorphe sont différents pour une même technique et d’une technique à l’autre.

(a) X-ray diffraction, (b) X-ray absorption at the Si J-edge, (c) Raman spectrometry and (d) Nuclear magnetic resonance (NMR) of 29Si for crystal in red (quartz or low-cristobalite) and SiO2 amorphous in blue respectively. For practical reasons, spectra are reported in arbitrary units. The conditions of acquisition of the spectra of the crystalline and amorphous phases are different for the same technique and from one technique to another.

3 La transition vitreuse

Contrairement au cas d’un solide cristallisé, on ne peut pas parler pour un verre de température de fusion. À l’inverse, la solidification d’un verre correspond à une augmentation continue et progressive de la viscosité lors du refroidissement d’un liquide, sans apparition de structure cristalline. Dans la figure 3, nous avons reporté les variations de la viscosité en fonction de la température, pour plusieurs silicates fondus. On ne distingue pas de rupture dans les courbes de viscosité entre les valeurs obtenues à haute température et celles à basse température. Ceci montre bien le passage continu du verre au liquide pour une propriété telle que la viscosité. La transition vitreuse, définie par sa température Tg, est un phénomène cinétique qui caractérise la perte d’équilibre thermodynamique interne. En effet, les propriétés d’un verre ne dépendent plus uniquement de la pression et de la température, mais aussi de la vitesse, |q|, à laquelle se produit la transition vitreuse.

La caractérisation la plus simple et la plus ancienne de cette transition est due à Parks et Huffmann [4]. Ils notent d’après Nernst (1911), qu’en chauffant un verre, « il passe de manière continue de l’état amorphe à l’état liquide, ses propriétés changeant régulièrement avec la température, sans aucune discontinuité ». En fait, comme ils l’écrivent, « alors qu’il n’y a pas de température précise comparable au point de fusion d’un cristal, il y a néanmoins un intervalle de température, net et reproductible, dans lequel de nombreuses propriétés changent avec une rapidité qui approche celle qui est observée dans la fusion d’un cristal. En bref, il y a un intervalle de ramollissement au lieu d’un point de fusion. Le verre tel qu’il existe au-dessous de cet intervalle de ramollissement diffère de manière si marquante du liquide qui existe au-dessus qu’il pourrait bien être considéré comme un état différent de la substance ».

En effet, si nous observons la variation d’enthalpie et ou celle de capacité calorifique avec la température (Fig. 4) pour deux vitesses de refroidissement ou de chauffe différentes, nous remarquons que pour un même liquide, la température de transition vitreuse varie avec la vitesse de refroidissement.

La transition vitreuse correspond à une zone de température et de pression dans laquelle les propriétés telles que les chaleurs spécifiques subissent une transition du second ordre. La température supérieure de cette zone est obtenue pour de grandes vitesses de refroidissement, |q1|, alors que la borne inférieure est obtenue pour les faibles vitesses, |q2|. La représentation utilisée dans la figure 4 provient des mesures de calorimétrie différentielle à balayage effectuées par Moynihan et al. [12,13]. Donc, les propriétés physicochimiques d’un verre dépendent de la vitesse à laquelle varie la température et donc de son histoire thermique.

Il est théoriquement possible d’obtenir des variations temporelles identiques pour toutes les propriétés, telles que la dilatation thermique ou la viscosité. Il apparaît donc clairement qu’il existe un temps de réponse à la variation de température. Nous appelons ce temps τ, temps de relaxation. Nous le définissons de la façon suivante : un liquide possède un grand nombre d’états configurationnels différents [14,15]. Chaque état correspond à un minimum d’énergie potentielle. Lorsque la température diminue, le temps de relaxation structurale, τ, d’un liquide augmente. Lorsque τ est suffisamment grand, le liquide ne peut plus procéder à des réarrangements structuraux de type coopératif. Ainsi, le nombre de configuration pouvant être atteint par un système diminue avec la température et, à température suffisamment basse (T < Tg), le liquide se fige : le système ne peut plus changer son état configurationnel. De plus, l’état de configuration du verre ne change pas de Tg à 0 K. On peut noter que la spectroscopie vibrationnelle Raman et infra-rouge suggère que la structure d’un verre est une image de la configuration instantanée du liquide [1619].

Le refroidissement uniforme d’un liquide à la vitesse |q| = dT/dt peut être assimilé à une suite de sauts instantanés de température ΔT = Tfi − Ti, où Tfi et Ti sont les températures finale et initiale, chaque saut étant suivi d’une période Δt pendant laquelle la température reste constante et égale à Tfi. Juste après une variation de température ΔT, la viscosité du liquide, ηl, vaut encore ηTi et diffère de ηTfi − ηTi de la nouvelle valeur d’équilibre, ηTfi. On appelle relaxation, le processus par lequel le liquide tend à atteindre l’état d’équilibre associé à la température finale Tfi. Pour caractériser la cinétique de cette évolution, on définit des temps de relaxation, ici des temps de relaxation viscosimétrique, τη :τη=(ηIηTfi)/δη/δt.

Expérimentalement, on constate que le temps de relaxation augmente lorsque la température diminue. Il est possible de distinguer trois cas :

  • Δt >> τη : la substance dispose d’un temps relativement long pour équilibrer sa structure à la nouvelle température. Nous sommes dans l’état liquide (ou celui du verre à l’équilibre thermodynamique) pour lequel la viscosité d’équilibre est atteinte de façon quasi-instantanée. Lors d’une augmentation de température ΔT, la viscosité diminue jusqu’à sa valeur d’équilibre ;

  • Δt ⋍ τη : domaine de la zone de transition vitreuse. La viscosité dépend à la fois du temps et Δt constant, dévie d’autant plus de la courbe d’équilibre que τη est supérieur à Δt et donc que la température diminue ;

  • Δt << τη : le temps de relaxation est très nettement supérieur au temps de la mesure. Aucun réarrangement configurationnel n’est alors possible. Le système est figé. Seule subsiste la partie vibrationnelle de la capacité calorifique, voisine de celle du cristal, puisqu’elle est peu sensible à la structure de la substance au-dessus de la température ambiante.

On pourrait tenir un raisonnement analogue pour l’enthalpie, le volume ou l’indice de réfraction.

Les temps de relaxation dépendent fortement de la température, de la structure et donc de la composition du liquide. Un traitement phénoménologique a été effectué par Moynihan et al. [13], Mazurin [20] et Kovacs [21]. Mais il est toutefois important de noter qu’il n’y a, a priori, aucune raison pour que les temps de relaxation des diverses propriétés soient identiques à vitesses de refroidissement égales.

On trouvera une discussion détaillée de cette variation des temps de relaxation en fonction des propriétés étudiées, dans Moynihan et al. [13]. Il semble « que les variations d’enthalpie survenant lors de l’approche de l’équilibre d’un verre à structure de réseau à la suite d’un changement de température pourraient être considérées comme résultant de la rupture de certaines liaisons, alors que les variations de volume seraient dues au réarrangement de la structure vers une configuration moins dense. On ne peut dire, a priori, lequel des deux processus devrait en moyenne se produire le premier. Ainsi, rompre des liaisons pourrait être un préalable aux regroupements modifiant le volume de la structure, de telle sorte que l’enthalpie se relaxerait plus vite que le volume. Au contraire, des réarrangements configurationnels conduisant à de grands changements de volume pourraient d’abord survenir, comprimant le réseau et provoquant la rupture des liaisons et le volume se relaxerait ainsi plus rapidement que l’enthalpie ». Dans la pratique, il semble que les écarts de temps de relaxation et de Tg volumiques et calorimétriques soient relativement faibles, voire quasi-inexistants pour les aluminosilicates liquides [22,23] et dus à des différences de vitesse de refroidissement ou de chauffe. Les temps de relaxation et les températures viscosimétriques de transition vitreuse (Tη <=> log η = 12 Pa.s) présentent des différences importantes avec ceux obtenus par dilatométrie et par calorimétrie. On trouve généralement, pour les aluminosilicates fondus, que la Tg obtenue par calorimétrie de chute correspond à 10,7 ± 0,5 Pa.s [24].

La viscosité est une donnée importante et très utilisée par l’industrie verrière. Elle a donc été, par souci d’uniformisation, normalisée. La température de la transition vitreuse est définie industriellement comme étant la température à laquelle la viscosité vaut 1012 Pa.s, pour une vitesse de refroidissement de l’ordre de quelques °C.min−1, ce qui correspond aux vitesses de refroidissement du verre lors des processus industriels d’élaboration. Cette valeur de la viscosité correspond à des temps de relaxation de viscosité d’environ 15 minutes.

D’un point de vue thermodynamique, nous pouvons dire que la température et la pression ne suffisent pas pour caractériser l’état de verre. Tool et Eichlin ont introduit le concept de température fictive [25], Tfic, pour caractériser le verre à pression constante. Nous pouvons la définir comme étant la température à laquelle le verre serait dans un état d’équilibre s’il pouvait être chauffé instantanément. On peut définir la température fictive lors d’un refroidissement en dilatométrie ou en calorimétrie, comme étant la température de transition vitreuse.

Il est possible de donner une définition thermodynamique formelle de la température fictive, en la considérant comme un paramètre d’ordre. On rappelle que la transition vitreuse ressemble à une transition du second ordre pour laquelle V, H, η, sont des fonctions continues mais pas Cp, α, K.

Un exemple simple de l’effet des températures fictives s’illustre en regardant la variation de viscosité à température constante en fonction du temps pour des verres ayant été recuits plusieurs jours afin d’obtenir des températures fictives différentes (Fig. 5). En effet, la température fictive contraint les variations de viscosité au cours du temps. Dans la figure 5, sont représentées les courbes de variation de la viscosité en fonction du temps pour deux températures fictives différentes et trois températures de mesures (777, 788 et 795 K). Ainsi, la courbe descendante est obtenue à partir d’un échantillon qui possède une température fictive inférieure à la température de mesure. Lorsque la température fictive du verre est supérieure à la température de mesure, le verre possède un état configurationnel plus désordonné (plus grand) que l’état qu’il devrait avoir si le verre était à l’équilibre thermodynamique ; c’est-à-dire que son entropie de configuration « fictive » est trop grande. Il a une viscosité plus faible que sa viscosité d’équilibre donc sa viscosité augmente avec le temps jusqu’au moment où la température fictive égale la température de mesure. Pour une température fictive inférieure à celle de la mesure, nous sommes dans le cas contraire donc la viscosité diminue jusqu’à l’établissement de l’équilibre thermique où la courbe rejoint la température de mesure. Nous constatons que les courbes de variations des propriétés avec le temps sont dissymétriques. Ceci résulte du fait qu’un liquide augmente son entropie (état de désordre) plus vite avec une augmentation de température, qu’il ne la diminue avec une diminution de température.

De façon similaire, des variations de propriétés en fonction du temps sont observées pour la densité ou les indices de réfraction [26,27].

thumbnail Fig. 3

Viscosité en fonction de la température en °C pour un verre de silice, SiO2, un tri et bi-silicate de sodium, NS3 et NS2, contenant respectivement 75 et 66 mol% de SiO2 et la différence à 100 étant du Na2O, les compositions NS1.5 et CS1.5 correspondent respectivement à 60SiO2–40Na2O et 60SiO2–40CaO (mol%). Les compositions NA75.6 et NA75.12 contiennent 75 mol% de SiO2 chacune et 6 ou 12 mol% d’Al2O3, la différence à 100 étant du Na2O (données de [8] pour les compositions NS3 et NAX. Y, de [9] pour CS1.5, NS1.5 et NS2 ; de [10] pour B2O3 ; de [11] pour NB82.10 = Pyrex).

Viscosity as a function of temperature in °C for a silica glass, SiO2, sodium silicate glass compositions, NS3 and NS2, containing respectively 75 and 66 mol% of SiO2 and the difference at 100 being Na2O, the compositions NS1.5 and CS1.5 correspond respectively to 60SiO2–40Na2O and 60SiO2–40CaO (mol%). The compositions NA75.6 and NA75.12 contain 75 mol% SiO2 each and 6 or 12 mol% Al2O3, the difference to 100 being Na2O (data of [8] for NS3 and NAX compositions. Y, from [9] for CS1.5, NS1.5 and NS2; [10] for B2O3; from [11] for NB82.10 = Pyrex).

thumbnail Fig. 4

Variations d’enthalpies (a) et de capacités calorifiques (b) en fonction de la température pour deux vitesses différentes de chauffe ou de refroidissement, |q1| > |q2| (redessiné d’après Neuville et Le Losq [2]).

Enthalpy (a) and heat capacity (b) variations as a function of temperature for two different heating or cooling rates, |q1| > |q2| (redrawn after Neuville and Le Losq [2]).

thumbnail Fig. 5

Variation de la viscosité avec le temps (d’après Neuville et Le Losq [2]).

Viscosity variation as a function of time (according to Neuville and Le Losq [2]).

4 Rôle des éléments chimiques dans un verre (structure et propriétés)

4.1 Les cations

L’objet de cet article est focalisé essentiellement sur des verres composés d’oxydes : SiO2, Al2O3, CaO, MgO, SrO, BaO, Li2O, Na2O, K2O, FeO, Fe2O3, B2O3, ZnO, ZrO, PbO, TiO2

La structure de tels verres implique une grande famille d’éléments répartis en plusieurs groupes, les formateurs de réseau, les modificateurs de réseau ou compensateurs de charge, les éléments intermédiaires, les éléments colorants et affinants.

  • i) les « formateurs de réseau » sont les oxydes qui peuvent former un verre seul Ces éléments sont, principalement, sous leurs formes cationiques : Si4+, B3+, Ge4+… Ces cations formateurs de réseau présentent des liaisons cation-oxygène très covalentes et donc directionnelles qui assurent la charpente tridimensionnelle du verre. Ces éléments forment avec l’oxygène des polyèdres de petites tailles : tétraédrique pour Si et Ge ou triangulaire pour B. Deux cations sont reliés entre eux par des oxygènes dits pontants. Ces polyèdres connectés forment un réseau désordonné tridimensionnel. Notons que l’oxyde de silicium, SiO2, ou silice, est l’oxyde majoritaire des verres commerciaux, et est le principal formateur du réseau vitreux. Dans le cas de la silice, les entités tétraédriques sont notées Qn n représente le nombre d’oxygènes pontants portés par l’atome central Q (typiquement Si). Le verre de silice est ainsi constitué de Si entouré de 4 oxygènes pontants, tous connectés à d’autres tétraèdres pour former le réseau tridimensionnel d’espèce Q 4 avec des ponts Si–O–Si (Fig. 1b). Cette structure est caractérisée par une très forte viscosité d’une part et une dépendance arrhénienne de la viscosité avec la température d’autre part (Fig. 3). Notons que le comportement arrhénien d’une propriété se visualise par une droite dans un diagramme log de la propriété en fonction de l’inverse de la température (log η = A + B/T). L’oxyde de bore B2O3 joue également le rôle de formateur de réseau, mais il forme des triangles plans BO3. Sa structure a donc un caractère fortement bidimensionnel, ce qui explique que la viscosité de B2O3 soit nettement plus faible que celle du réseau tridimensionnel de la silice (environ 14 ordres de grandeur à 1000 °C, Fig. 3). En plus de réduire la viscosité, l’oxyde de bore est utilisé car il améliore grandement les propriétés thermiques et mécaniques du verre comme dans le cas du verre Pyrex® (composition NB82.10, Fig. 3).

  • ii) les « modificateurs de réseau », sont des oxydes ne formant pas de verre par eux même. Ce sont principalement les alcalins et les alcalinoterreux. L’introduction de Rn+On/2 (n = 1 ou 2) modifie la continuité du réseau tridimensionnel constitué par les formateurs de réseau. La connectivité du réseau (ou polymérisation) est réduite en créant des oxygènes non-pontants qui ne sont plus liés qu’à un seul formateur de réseau (Fig. 4). Les alcalins et alcalinoterreux jouent un rôle similaire vis-à-vis de la structure et des principales propriétés des verres, mais présentent quelques caractéristiques différentes. Ainsi, l’oxyde de sodium Na2O est appelé « fondant » et il provient de la décomposition de carbonates de sodium. Il transforme la silice en silicate par attaque chimique et sert essentiellement à réduire la température nécessaire à la fusion de la silice. Au contraire, l’oxyde de calcium, CaO, issu de la décomposition de CaCO3 sera un « stabilisant » du verre car il forme des liaisons Ca–O un peu plus fortes que les liaisons Na–O et augmente donc la durabilité du verre. Ces 3 oxydes, SiO2, Na2O et CaO représentent plus de 95 % de la composition pondérale des verres industriels, qui sont, pour cette raison, généralement appelés des verres sodocalciques. D’un point de vue pratique, une grande majorité des verres commerciaux contiennent également de l’oxyde de potassium, K2O, et de l’oxyde de magnésium, MgO. L’oxyde de magnésium est généralement ajouté car il améliore la résistance hydrolytique et les propriétés mécaniques des verres comme l’oxyde d’aluminium. Cependant, ces deux oxydes ont également tendance à augmenter la température du bain silicaté et les températures de travail du verre.

En ajoutant Rn+On/2 à la silice, il y a création d’oxygènes non-pontants, qui établissent des liaisons ioniques R…O avec le cation Rn+ (Fig. 4). La liaison R…O est plus faible que celle impliquée dans les ponts Si–O–Si, ce qui entraîne une forte diminution de la viscosité, comme dans le cas du trisilicate de sodium fondu, NS3 (Fig. 3). La formation des oxygènes non-pontants se matérialise facilement dans les spectres Raman ou RMN du 29Si [2,28,29] ou récemment par diffusion inélastique des rayons X [30,31]. Leurs proportions augmentent avec la teneur en sodium ce qui augmente les entités faiblement connectées, Q3, Q2…, contribuant à la diminution de la viscosité. Sur la figure 3, NS1.5 a une viscosité plus faible que NS3, ce qui résulte de la teneur en sodium qui est passée de 25 à 40 mol%. Comme nous l’avons vu avec le NS3, les oxygènes non-pontants sont formés lors de l’ajout d’éléments modificateurs de réseau (Li+, Na+, K+, Mg2+, Ca2+, Fe2+…) qui viennent dépolymériser le réseau de tétraèdres, et qui sont généralement dans des coordinances élevées. Dans la figure 3, en comparant la courbe de viscosité de NS1.5 qui est plus faible que celle du CS1.5, on constate clairement que le sodium, appelé « fondant », participe davantage à la déconnection du réseau que le calcium appelé « stabilisant ».

  • iii) les « compensateur de charges », les alcalins et alcalinoterreux peuvent changer de rôle et devenir des éléments compensateurs de charge proche de site ayant un déficit de charge. C’est le cas notamment des sites (AlO4) et (BO4). L’aluminium s’insère dans le réseau dans un site tétraédrique, similaire à Si4+. Mais, étant un cation Al3+, le tétraèdre AlO4 a un déficit de charge qui nécessite une compensation pour le stabiliser énergétiquement, ce qui est accompli par la proximité d’un alcalin ou d’un alcalino-terreux, typiquement. Le cas du bore, B3+, est différent. En effet il y a un changement de site du bore : les triangles BO3, entièrement stabilisé, initialement présents dans le verre pur B2O3, se transforment en tétraèdres BO4 avec l’ajout d’oxydes Rn+On/2, ce qui nécessite une compensation de charge autour de (BO4) similaire à (AlO4). La formation de ces tétraèdres BO4 augmente la connectivité du réseau par rapport à B2O3, qui a, comme nous l’avons vu précédemment, une structure avec un fort caractère bidimensionnel. Cette augmentation de la connectivité résulte en une augmentation de la viscosité et des températures de transition vitreuse dans les borates alcalins, un comportement opposé à celui des silicates. Cela s’observe en comparant la viscosité de B2O3 fondu, nettement plus faible que celle du verre NB82.10, qui correspond à une composition de Pyrex® [11].

L’ensemble des autres cations sont présents dans les verres fabriqués par l’homme, mais représentent en général de l’ordre de 5 à 15 mol%, ils peuvent avoir cependant des rôles spécifiques.

  • iv) les « éléments intermédiaires », sont des oxydes qui vont avoir une position de formateur de réseau mais qui ne peuvent pas former de verre seul. Les principaux éléments intermédiaires sont Al3+, Pb2+, Zn2+, Ti4+ ou Fe3+.

En ajoutant de l’alumine à NS3, l’aluminium se trouve principalement en coordinance 4 et la viscosité augmente fortement et redevient quasi-arrhénienne, comme illustré dans la figure 3 pour la viscosité de NA75.6 et NA75.12 qui contiennent respectivement 6 et 12 mol% d’Al2O3. Un comportement similaire est observé en considérant le silicate de calcium fondu, CaSiO3 (verre de composition wollastonite). Comme pour le NS3, l’ajout d’alumine à CaSiO3 entraîne une forte augmentation de la viscosité comme on peut l’observer pour l’anorthite fondu, CaAl2Si2O8 [2]. Celui-ci correspond à un système totalement polymérisé, formé d’un réseau tridimensionnel de tétraèdres AlO4 et SiO4 avec du Ca2+ dans les trous du réseau tridimensionnel jouant le rôle de compensateur de charge de l’aluminium (Fig. 3). Al3+ joue alors un rôle de formateur de réseau. Il est même possible de définir un rôle de réticulateur (i.e., élément qui assure une forte connexion entre des éléments formateurs de réseau d’après Patrick Royall et al. [32]).

L’oxyde de plomb permet un accroissement de la densité, l’indice de réfraction et la brillance du verre. Le plomb a permis le développement des instruments optiques, lentilles, télescopes, et également les arts de la table et les luminaires avec le cristal au plomb. Le plomb joue un double rôle, car il peut être à la fois formateur de réseau en coordinance 4 créant en général un sous réseau de PbO4 [28,29,33], mais aussi être un modificateur de réseau en coordinance 6, créant des oxygènes non-pontants sur les tétraèdres de SiO4. Le rôle du plomb est complexe aussi bien dans une matrice vitreuse que dans les processus d’altération. Le lecteur trouvera un ouvrage de référence sur le plomb récemment publié [34].

  • v) les éléments colorants ou décolorants du verre correspondent généralement aux oxydes métalliques des éléments de transition et à certains lanthanides. Parmi les éléments colorants, on peut différencier les éléments à valence unique des éléments multivalents. Le cobalt, Co2+, est l’élément le plus utilisé. En coordinance 4 dans un verre sodocalcique, il donne une coloration bleue intense. Mais le même élément en coordinance 6 dans les verres boratés faiblement alcalins donnera une couleur rose [35,36]. Le nickel, Ni2+ est également un élément colorant à valence unique. Il donne dans des verres sodocalciques une couleur brunâtre, il est alors principalement en coordinance 5 (mais avec souvent un mélange avec des sites en coordinance 4 et 6) [37]. Il peut aussi colorer le verre en pourpre si on remplace le sodium par du potassium et en jaune dans des verres boratés au lithium [37,38]. Ces changements de couleurs sont liés à des changements de coordinance des ions Ni2+ : dans les verres boratés faiblement alcalins, une coordinance 6 très ordonnée est observée alors que la présence de potassium va favoriser une coordinance 4 [37,38]. Mais la majorité des colorations est obtenue par des éléments multivalents dont la valence et les bandes d’absorption dépendent de l’état redox. Le tableau 1 indique les principales couleurs obtenues avec certains oxydes métalliques en fonction de leur rédox et coordinances dans des verres sodocalciques. Certains éléments agissent aussi comme décolorant en modifiant l’état redox d’un autre élément multivalent. La couleur d’un verre contenant un élément de transition peut varier en fonction de la nature du verre (silicate, borate, phosphate) [39,40].

Certaines terres rares dans les verres sodocalciques ont également un pouvoir colorant, généralement plus faible comparé aux éléments de transition : i) le néodyme Nd3+ donne une couleur bleue-pourpre, ii) le praséodyme Pr3+ donne une couleur jaune-vert, iii) l’erbium Er3+ donne une couleur rose.

  • vi)des additifs d’oxydo-réduction pour ajuster le pouvoir rédox du bain de fusion, ce paramètre jouant un rôle important sur la transmission du verre dans l’infrarouge et sur sa teinte finale ; les plus utilisés sont le carbone pour son pouvoir réducteur, et l’oxyde de soufre, SO3, obtenu par décomposition de sulfate de sodium, pour son pouvoir oxydant. En outre, ces éléments (As, Sb) vont également jouer sur l’affinage du bain verrier et contribuer à l’évacuation des bulles.

Tableau 1

Pouvoir colorant de quelques oxydes métalliques dans une matrice vitreuse sodocalcique.

Coloring power of some metal oxides in a soda lime silicate glass.

4.2 Les anions

Nous venons de parler des cations, mais ils représentent au plus 50 % d’un verre, le reste étant généralement constitué d’anions. Dans le sous-réseau des anions, l’élément le plus important est généralement l’oxygène qui occupe différentes positions. On distingue en effet (Fig. 6) :

  • les oxygènes pontants, OP, qui lient des tétraèdres entre eux et qui n’ont pas de charge effective car ils sont polarisés par deux liaisons covalentes ;

  • les oxygènes non-pontants, ONP, associés à un seul tétraèdre. Ils possèdent de ce fait une charge résiduelle car ils sont partiellement polarisés par une seule liaison covalente ;

  • les oxygènes libres, Ol, associés à aucun tétraèdre et qui sont donc peu polarisés ;

  • le oxygènes tricoordonnés, connectés à trois polyèdres, généralement un ou deux tétraèdres et un pentaèdre. Des oxygènes triclusters sont un cas particulier connectant trois tétraèdres TO4 (T = Si, Al). Ces oxygènes triclusters ne représentent au mieux que quelques pourcents et joue un rôle très faible sur la structure et les propriétés des verres et des liquides [41].

Cette vision d’un réseau constitué d’oxygènes ayant des rôles différents est complémentaire de celle décrite par le réseau cationique. Certaines techniques expérimentales telle que la RMN de l’oxygène 17, 17O, permettent de visualiser ce réseau anionique et de mettre en évidence la connectivité du réseau [42,43].

Ce réseau anionique composé d’oxygènes ayant divers rôles s’observe également dans des verres de chalcogénures dans lesquels le soufre ou le sélénium jouent un rôle de liguant identique à celui de l’oxygène. Dans ces verres, il est possible de montrer l’existence de soufre pontant ou non-pontant [44].

thumbnail Fig. 6

Schéma de la structure d’un aluminosilicate de calcium vitreux.

Diagram of the structure of a calcium aluminosilicate glass.

4.3 Vers une vision universelle de la structure d’un verre

Les idées développées dans les paragraphes précédents montrent qu’un verre, vu par le réseau cationique ou anionique, présente un caractère désordonné. Cependant Neville Greaves a montré à l’aide de l’EXAFS du Na que l’ordre à courte distance autour du Na+ dans les verres silicatés était relativement bien établi et que, de plus, ces cations présentent une répartition non aléatoire au sein du réseau silicaté [45,46]. À la suite de ces études pionnières, des recherches spectroscopiques (EXAFS, RMN, diffraction des neutrons…) ou rhéologiques (viscosité et calorimétrie) ont montré que les distances cation-oxygène et la coordinance des cations sont bien définies [4756]. D’autres travaux ont confirmé l’existence d’ordres à moyenne distance autour des cations modificateurs, impliquant une structuration du réseau silicaté ou aluminosilicaté des verres à moyenne distance [45,50,52,5761]. D’après ces études, les cations ne sont pas distribués de façon homogène au sein de la structure du verre, ce qui implique une modification du modèle classique proposé dans les années 1930 par Warren et collaborateurs [62,63]. Greaves en 1985 a proposé le modèle du réseau aléatoire modifié (MRN, Modified Random Network) [45]. Ce modèle considère une structuration du verre en domaines enrichis en cations modificateurs, séparés de domaines enrichis en formateurs (Fig. 7). On distingue ainsi des chenaux ou clusters, plus ou moins percolants, concentrant les cations modificateurs et les oxygènes non-pontants. Des simulations par dynamique moléculaire sur des silicates de sodium et de potassium mettent, elles aussi, en évidence l’existence de telles structures à l’état liquide [60,61]. L’existence de chenaux de percolation permet d’expliquer la diffusion ionique rapide et découplée du réseau des éléments modificateurs dans les verres et liquides à des températures proches de la Tg [59]. De plus, elle est en accord avec l’observation de zones de démixtion le long des joints binaires MO–SiO2 (avec M = Mg, Ca, Na), démixtion pouvant s’expliquer par l’immiscibilité entre les couples M-Q3 et les espèces Q4.

Greaves et Ngai ont proposé une version « modifiée » du modèle MRN pour les tectosilicates vitreux [64] : le modèle CCRN (Compensated Continuous Random Network), ou modèle aléatoire continu compensé, prédit que les cations compensateurs de charge sont aussi présents dans des chenaux mais aux limites de ceux proches d’éléments ou d’entités tels que (AlO4) ou (BO4) qui nécessitent une compensation de charge. L’existence de sous-réseau semble en accord avec les simulations de Shintani et Tanaka [65], qui suggèrent que des structures montrant un ordre quasi-cristallin existent dans le liquide surfondu proche de Tg et influencent fortement la dynamique et la thermodynamique du système. Il existe donc probablement un lien entre hétérogénéités structurales et compositionnelles [66]. Ces chenaux de percolation enrichis en élément modificateur de réseau peuvent également être les points de départs de zone de démixtion et/ou de nucléation, ce qui est en bon accord avec les travaux de nucléation de Dargaud et al. [67,68]. Cette vision d’un verre organisé en chenaux de percolation est aujourd’hui reconnue comme une approche universelle de la structure des verres d’oxydes mais également des verres de chalcogénures.

thumbnail Fig. 7

Chenaux de percolation vu par dynamique moléculaire, Na bleu foncé, K, bleu clair, blanc, oxygène, les nœuds rouges et jaune correspondent au centre des tétraèdres de Si ou Al [52].

Percolation channels seen by molecular dynamics, Na dark blue, K, light blue, white, oxygen, the red and yellow nodes correspond to the center of the Si or Al tetrahedra [52].

4.4 Cas d’un verre complexe : le verre de stockage

Les verres utilisés pour le stockage des déchets domestiques ou nucléaires sont des exemples typiques de compositions complexes. Il est d’usage de décrire la composition d’un verre en termes de pourcentages molaires ou massiques des oxydes le constituant mais cela peut donner une vision faussée de ce qu’est ce matériau : le verre n’est pas le simple assemblage d’oxydes isolés car tous les éléments sont impliqués dans des connexions construisant la structure du verre. Il serait plus pertinent de parler en termes de pourcentages en éléments.

Plus de 30 éléments entrent dans la composition des verres utilisés pour le stockage des déchets. L’intérêt du verre prend ici toute sa valeur. En effet, toutes les espèces chimiques, y compris celles issues des produits de fission, participent à la structure du verre en formant des liaisons chimiques et en participant donc à la structure du verre. L’avantage du verre sur d’autres matériaux (comme les cristaux) est sa flexibilité structurale permettant d’incorporer des cations de forces de champ variés et occupant des sites de tailles variées.

5 Le verre, un matériau unique

Que cela soit par sa structure ou ses propriétés, un verre ayant une composition chimique donnée est un matériau unique. Les plus anciens verres de notre système solaire ont plusieurs milliards d’années et ont pu être observés sur la surface de la Lune (et ramenés sur Terre pour des recherches scientifiques lors des missions Apollo des années 1970). Sur Terre, les plus anciens verres naturels sont plus jeunes, car le verre est un matériau fortement altérable en présence d’eau, ce qui provoque son altération en quelques millions d’années. Le lecteur pourra se référer à l’article de Brunswic et collaborateurs dans ce volume. Concernant les verres dits humains, à savoir fabriqués par notre activité, les plus anciens ont quelques milliers d’années et montrent très souvent des traces d’altération (Fig. 8).

Quels que soient le lieu et l’époque de fabrication, si la composition chimique et les conditions de formation sont identiques, le verre fabriqué sera identique en termes de structure et de propriétés. La composition chimique et les conditions de formation sont donc les critères qui vont conditionner l’obtention et les propriétés d’un verre. Il est important de souligner que le matériau vitreux obtenu se distingue des éléments utilisés pour le produire (typiquement les oxydes servant à son élaboration). Le verre n’est pas l’addition de plusieurs oxydes mais un nouveau matériau issu de la réaction des matières premières à haute température.

Dans le tableau 2, nous donnons la composition molaire, en termes d’oxydes, d’un verre pour lequel nous avons mesuré (i) les viscosités permettant de déterminer l’entropie de configuration, (ii) les enthalpies de formation et (iii) les chaleurs spécifiques. L’ensemble de ces mesures a permis de calculer l’enthalpie libre de formation ainsi que l’enthalpie de dissolution du verre. Nous avons également reporté dans le tableau 2, des grandeurs thermodynamiques pour le verre et ses oxydes constitutifs. Une observation évidente dans le tableau 2 est la différence entre certaines des propriétés physico-chimiques d’un verre et celle des éléments le constituant. Un verre est donc un matériau unique, nouveau et différent de ces éléments constitutifs.

thumbnail Fig. 8

Ancienne carafe romaine retrouvée dans le forum romain (photo Neuville®).

Ancient Roman decanter found in the Roman forum (photo Neuville®).

Tableau 2

Composition molaire d’un verre, et masse et volume des oxydes, température de fusion et enthalpie de formation à 298 K des oxydes et du verre. Données issues de Robie et Hemingway pour les Mmol, Vmol, Tm, et ΔHf298 des oxydes [69], et mesure IPGP pour le verre. Données de Linard [70], Majzlan et al. [71] et Navrotsky et al. [72,73] pour les ΔHs des oxydes et IPGP pour celle du verre. Densité du verre 2,7116 ± 0,0004.

Molar composition of a glass, and mass and volume of oxides, melting temperature and enthalpy of formation at 298 K of oxides and glass. Data from Robie and Hemingway for Mmol, Vmol, Tm, and ΔHf298 oxides [69], and IPGP measurement for glass. Data from Linard [70], Majzlan et al. [71] and Navrotsky et al. [72,73] for the ΔHs of oxides and IPGP for that of glass. Glass density 2,7116 ± 0,0004.

6 Conclusion

Dans ce court article, nous avons montré que le verre est un matériau de structure désordonnée, caractérisé par l’absence d’ordre à grande distance, et présentant un phénomène de transition vitreuse. De plus, un verre est un matériau unique, dont la structure et les propriétés sont différentes de celles de ses éléments constitutifs. Le rôle structural des éléments chimiques dans un verre est relativement bien contraint entre formateur, modificateur de réseau, compensateur de charge, éléments de transition. Le rôle des éléments peut varier en fonction de la chimie globale du verre, et les conditions de formation.

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Citation de l’article : Daniel R. Neuville, Laurent Cormier, Le verre : un matériau d’hier, d’aujourd’hui et de demain, Matériaux & Techniques 110, 404 (2022)

Liste des tableaux

Tableau 1

Pouvoir colorant de quelques oxydes métalliques dans une matrice vitreuse sodocalcique.

Coloring power of some metal oxides in a soda lime silicate glass.

Tableau 2

Composition molaire d’un verre, et masse et volume des oxydes, température de fusion et enthalpie de formation à 298 K des oxydes et du verre. Données issues de Robie et Hemingway pour les Mmol, Vmol, Tm, et ΔHf298 des oxydes [69], et mesure IPGP pour le verre. Données de Linard [70], Majzlan et al. [71] et Navrotsky et al. [72,73] pour les ΔHs des oxydes et IPGP pour celle du verre. Densité du verre 2,7116 ± 0,0004.

Molar composition of a glass, and mass and volume of oxides, melting temperature and enthalpy of formation at 298 K of oxides and glass. Data from Robie and Hemingway for Mmol, Vmol, Tm, and ΔHf298 oxides [69], and IPGP measurement for glass. Data from Linard [70], Majzlan et al. [71] and Navrotsky et al. [72,73] for the ΔHs of oxides and IPGP for that of glass. Glass density 2,7116 ± 0,0004.

Liste des figures

thumbnail Fig. 1

Représentation 2D de : a) une structure cristalline constituée d’atome de Si (cercle noir) et d’oxygène (cercle blanc), on constate un motif géométrique (hexagone) et une périodicité alors que dans la figure b) des arrangements atomiques sont présents (anneaux à 3, 4, 5, 6 tétraèdres) mais ces arrangements ne sont pas réguliers ni périodiques (d’après Zachariasen [6]). Notons que les deux structures ont le même nombre d’atome de Si, mais n’occupent pas la même surface en raison d’une densité plus faible pour le verre que pour le cristal.

2D representation of: a) a crystal structure consisting of Si atom (black circle) and oxygen (white circle), there is a geometric pattern (hexagon) and a periodicity while in figure b) atomic arrangements are present (rings with 3, 4, 5, 6 tetrahedra) but these arrangements are not regular or periodic (according to Zachariasen [6]). Note that both structures have the same number of Si atoms, but do not occupy the same surface area due to a lower density for glass than for crystal.

Dans le texte
thumbnail Fig. 2

(a) Diffraction des rayons X, (b) Absorption des rayons X au seuil K de Si, (c) Spectrométrie Raman et (d) Résonance magnétique nucléaire (RMN) du 29Si respectivement pour du cristal en rouge (quartz ou low-cristobalite) et SiO2 amorphe en bleu. Pour des raisons pratiques, les spectres sont reportés en unité arbitraire. Les conditions d’acquisition des spectres des phases cristallines et amorphe sont différents pour une même technique et d’une technique à l’autre.

(a) X-ray diffraction, (b) X-ray absorption at the Si J-edge, (c) Raman spectrometry and (d) Nuclear magnetic resonance (NMR) of 29Si for crystal in red (quartz or low-cristobalite) and SiO2 amorphous in blue respectively. For practical reasons, spectra are reported in arbitrary units. The conditions of acquisition of the spectra of the crystalline and amorphous phases are different for the same technique and from one technique to another.

Dans le texte
thumbnail Fig. 3

Viscosité en fonction de la température en °C pour un verre de silice, SiO2, un tri et bi-silicate de sodium, NS3 et NS2, contenant respectivement 75 et 66 mol% de SiO2 et la différence à 100 étant du Na2O, les compositions NS1.5 et CS1.5 correspondent respectivement à 60SiO2–40Na2O et 60SiO2–40CaO (mol%). Les compositions NA75.6 et NA75.12 contiennent 75 mol% de SiO2 chacune et 6 ou 12 mol% d’Al2O3, la différence à 100 étant du Na2O (données de [8] pour les compositions NS3 et NAX. Y, de [9] pour CS1.5, NS1.5 et NS2 ; de [10] pour B2O3 ; de [11] pour NB82.10 = Pyrex).

Viscosity as a function of temperature in °C for a silica glass, SiO2, sodium silicate glass compositions, NS3 and NS2, containing respectively 75 and 66 mol% of SiO2 and the difference at 100 being Na2O, the compositions NS1.5 and CS1.5 correspond respectively to 60SiO2–40Na2O and 60SiO2–40CaO (mol%). The compositions NA75.6 and NA75.12 contain 75 mol% SiO2 each and 6 or 12 mol% Al2O3, the difference to 100 being Na2O (data of [8] for NS3 and NAX compositions. Y, from [9] for CS1.5, NS1.5 and NS2; [10] for B2O3; from [11] for NB82.10 = Pyrex).

Dans le texte
thumbnail Fig. 4

Variations d’enthalpies (a) et de capacités calorifiques (b) en fonction de la température pour deux vitesses différentes de chauffe ou de refroidissement, |q1| > |q2| (redessiné d’après Neuville et Le Losq [2]).

Enthalpy (a) and heat capacity (b) variations as a function of temperature for two different heating or cooling rates, |q1| > |q2| (redrawn after Neuville and Le Losq [2]).

Dans le texte
thumbnail Fig. 5

Variation de la viscosité avec le temps (d’après Neuville et Le Losq [2]).

Viscosity variation as a function of time (according to Neuville and Le Losq [2]).

Dans le texte
thumbnail Fig. 6

Schéma de la structure d’un aluminosilicate de calcium vitreux.

Diagram of the structure of a calcium aluminosilicate glass.

Dans le texte
thumbnail Fig. 7

Chenaux de percolation vu par dynamique moléculaire, Na bleu foncé, K, bleu clair, blanc, oxygène, les nœuds rouges et jaune correspondent au centre des tétraèdres de Si ou Al [52].

Percolation channels seen by molecular dynamics, Na dark blue, K, light blue, white, oxygen, the red and yellow nodes correspond to the center of the Si or Al tetrahedra [52].

Dans le texte
thumbnail Fig. 8

Ancienne carafe romaine retrouvée dans le forum romain (photo Neuville®).

Ancient Roman decanter found in the Roman forum (photo Neuville®).

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